La felouque
oubliée – Episode 7
Un
an déjà. Cela faisait un an qu’Eric avait quitté ce monde. Granny avait
traversé cette épreuve avec le courage qui la caractérise. Epaulée par sa
famille et ses amis, Granny avait su trouver le chemin de l’apaisement. Elle
regardait maintenant vers demain. Contre toute attente et alors qu’elle se
croyait condamnée les médecins lui avaient annoncée un recul de la maladie.
C’était assez exceptionnel mais les nombreux examens complémentaires l’avaient
confirmé.
Alors
qu’elle mettait de l’ordre dans le grenier, Granny retomba sur le coffre à
bijoux contenant la felouque miniature offerte par Dihem. Elle le considéra
comme un signe du destin. Le lendemain Granny préparait une petite valise et
prit un vol pour Tunis. Elle envoya un mail à Inès : « Mon Inès chérie ; je pars à Kerkennah. Je ne sais pas si je
retrouverai Dihem après toutes ces années mais je veux me donner la possibilité
d’essayer. Je sais que tu en comprends l’importance. Sois gentille et passe de
temps en temps arroser les plantes ; prends soin de mes cactus tu sais que
j’y tiens. Tu sauras trouver les mots pour rassurer le reste de la famille.
Inès : je suis heureuse de ce choix. Je t’embrasse. Granny ».
Retour vers
Kerkennah, patrie de mon amour
Tassadit
était sur le bac partant de Sfax à Sidi youssef à Kerkennah. L’étendue de la
mer était comme un miroir qui reflétait la beauté de la vie. A 68 ans, Tassadit
était encore une belle femme et le cheminement de ces dernières années lui
donnaient un éclat particulier. Au-delà de ses traits, sa beauté intérieure
irradiait et attirait l’attention. Tassadit
se demandait bien sur si elle retrouverait Dihem après ces longues années de
séparation. Elle se devait d’essayer. Elle lui avait promis qu’elle reviendrait
à Kerkennah.
Au
débarquement, une foule grouillait sur le port. Des banderoles annonçaient
l’événement : le Festival de la sirène. Dihem lui en avait parlé, se
souvint elle. La musique folklorique était à l’honneur et diverses animations,
expositions photographiques, ateliers poétiques et d’écritures se tenaient en
divers lieux de l’île.
Le mystère des
chemins du cœur
D’instinct
Tassadit se dirigea vers une exposition photographique à proximité du port sous
une halle. Plusieurs photos de felouques se succédaient, puis une série de
portraits de Kerkenniens et à l’opposé une dizaine de couchers de soleil. Tous
ces clichés étaient splendides et avaient, pour Tassadit, quelque chose de
familier.
Elle
s’approcha de plus près d’un des cadres et elle lut : Dihem.
Voyant
son trouble, une kerkennienne portant autour du cou un badge du festival,
s’adressa à elle :
-
Ces
photos vous plaisent ?
-
Oui…
elles sont magnifiques. L’auteur est bien Dihem ?
-
C’est
exact. Il s’agit de mon cousin. Il a du talent n’est ce pas ? Dihem prend
des photos depuis ses plus jeunes années mais il avait toujours refusé de les
exposer. Croyez-le ou non c’est la première fois que le public les voit. Vous
avez l’air ému madame. Connaissez-vous Dihem ?
-
On
peut le dire… Je l’ai connu il y a bien longtemps. Habite t il loin d’ici
madame ; je souhaiterais le revoir ?
-
Appelez-moi
Amel. Les amis de mon cousin sont les miens. A voir votre valise vous venez
d’arriver. Avez-vous une réservation dans un hôtel ?
-
J’ai
réservé une chambre au Dar Kerkennah
-
Très
bon choix. Je termine mon service dans quelques minutes. Une de mes cousines va
prendre le relai. Je me propose de vous y emmener si vous pouvez attendre un
peu. Il a construit une maison originale vous le verrez dans le village de
Ouled Bou ali. Dihem est…comment dire… un être à part…
-
C’est
très gentil à vous. Dans ce cas, je vais continuer de profiter des photos de
Dihem en vous attendant.
Tassadit
était émue par tant d’hospitalité. A regarder les clichés de Dihem, elle
pouvait se rendre compte du chemin qu’il avait parcouru. Elle sentait sa
présence dans ces photos. Elle regardait ces couchers de soleil à travers les
yeux de Dihem.. Elle se retenait de les toucher. Dihem habitait donc toujours à
Kerkennah.
Comment
réagirait-il à ces retrouvailles ? Se souviendrait-il d’elle ? Tant
d’années s’étaient écoulées sur le long fleuve de la vie…
La suite de La
Felouque oubliée dans le prochain épisode
ZE VENUS ZB, 1er juin 2014
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